Le laïcisme est-il la réponse à l’islamisme ?

L’islamisme radical qui est venu massacrer nos proches et nos familles jusque sur notre sol, a proclamé agir contre « la bannière de la croix ». Il ne fait aucun doute que, pour nos agresseurs, c’est l’identité chrétienne de notre nation qui en fait une cible. Lorsqu’ils ajoutent la référence aux « croisés », ils projettent sur le conflit du Proche-Orient une interprétation clairement religieuse. Pour beaucoup, la cause est entendue : on se massacre au nom de Dieu, et les religions sont irrémédiablement une cause de violence.

Le deuil à peine achevé, des voix l’élèvent, au nom du laïcisme, pour réclamer que tout symbole religieux quel qu’il soit disparaisscreche_de_noele du paysage publique. Et en cette période de Noël, ce sont les crèches qui sont visées. Les mairies devraient donc les bannir, pour permettre aux fêtes commerciales de générer leur chiffre d’affaire, sans évoquer la fête religieuse qui en est l’origine.

 

Ce laïcisme fait une triple erreur de perspective, qui pourrait être dramatique.

D’abord, vouloir faire disparaître toute référence religieuse de notre société, c’est déjà prendre une option religieuse forte, et imposer de manière unilatérale que Dieu n’existe pas, que son évocation est une erreur et un facteur de trouble, et que seule l’absence de référence à Dieu est licite pour la paix sociale. L’état « laïciste » (et non laïque) n’autorise publiquement que l’expression de l’absence de Dieu, ce qui revient à nier que la recherche spirituelle est une dimension fondamentale de l’existence humaine, et donc de toute société humaine. En imposant ce vide métaphysique dans le paysage social, l’état laïciste laisse la soif spirituelle de ses membres s’étancher aux sources les plus diverses, des plus primitives aux plus radicales.

En second lieu, faire disparaître de notre société toute référence à ses racines chrétiennes, ce serait répondre aux revendications de nos agresseurs, ce serait faire injure à tous ces chrétiens du Moyen-Orient qui payent encore de leur vie la simple fidélité à leur foi, l’unique fait de ne pas renoncer à eux-mêmes, leur conscience, leurs valeurs. En pliant à ces exigences, nous préparons tous les renoncements à nos propres valeurs, à notre culture. Pour les raisons citées plus haut, nous ménageons ainsi dans l’âme de notre société un vide abyssal qui ne demande qu’à être conquis par la soumission à l’Islam, ou à tout autre radicalisme.

Enfin, ce renoncement aux racines chrétiennes qui ont fondé toute notre culture occidentale nous priverait des seules armes qui constituent la réponse juste aux violences qui nous sont infligées.

Face aux fanatiques transformés en bombes vivantes qui sacrifient leur vie en annihilant celles de dizaines d’innocents, l’Evangile enseigne : « il n’y a pas de plus grand amour que de donner sa vie pour ses amis » et « ce que vous faites au plus petit d’entre les miens, c’est à moi que vous le faites ». La dignité fondamentale de toute personne humaine s’enracine, pour un chrétien, dans le fait que l’homme est à l’image de Dieu, et que Dieu s’est fait homme en Jésus-Christ. Il a fallu des siècles pour que ce respect fondamental de la personne humaine fonde des sociétés de paix et de respect des droits de l’homme. Les heures sombres de notre histoire sont celles où ces valeurs ont été oubliées. Ce don de la vie pour l’autre, si profondément humain, a poussé des sauveurs spontanés à couvrir de leur corps leurs voisins pour les protéger des balles. Il pousse d’autres à faire preuve de courage et risquer leur vie pour mettre les terroristes hors d’état de nuire et les empêcher de faire d’autres victimes. Donner sa vie pour son prochain, pour sa famille, pour son pays, et non pour tuer des innocents.

Les chrétiens du Moyen-Orient nous montrent aussi qu’on peut donner sa vie par fidélité à sa foi, à ses valeurs. Ce sacrifice pacifique, qui ne fait aucune autre victime, à l’image du Christ en croix, est un témoignage que la Vérité a plus d’importance que notre vie et doit être transmise coûte que coûte. Je ne peux m’empêcher de faire le parallèle avec la Taqyia, cette dissimulation prêchée par l’islam et qui permet au musulman de renier sa foi si c’est sous la contrainte, et de se dissimuler par le mensonge si c’est pour la victoire d’Allah. L’exigence de vérité (qui n’est pas croyance, mais connaissance de la réalité) fonde la volonté de dialogue et constitue le seul moyen de parvenir à une paix juste et durable : « amour et vérité se rencontrent, justice et paix s’embrassent » dit la Bible. Nous ne devons jamais renoncer à cette exigence de vérité, tout en étant conscients qu’elle n’est pas toujours partagée par nos interlocuteurs.

Enfin, la seule issue d’un conflit meurtrier comme celui que nous connaissons, passera nécessairement par le pardon. Il ne s’agit pas d’une abdication ni d’un renoncement. Mais l’établissement d’une paix juste, et la restauration d’un respect mutuel, nécessitent d’enrayer la spirale infernale de la violence et de la vengeance. Et le pardon est une condition incontournable pour y parvenir. Ce pardon, qui n’ai pas un déni de la souffrance, mais une confiance renouvelée par-delà les blessures infligées, il nous vient tout droit de l’Evangile. Il restera toujours le geste le plus difficile à accomplir, mais il s’impose pour tout chrétien.

Alors ne laissons pas le laïcisme nous priver des valeurs les plus précieuses pour traverser ces temps troublés, et sachons puiser dans notre culture et l’héritage de nos pères les ressources spirituelles pour y faire face.

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